Les racines de demain : les forêts du Canada ont besoin de nous

Terres boréales, Ont. (Photo de CNC)
Par Lisa McLaughlin, vice-présidente, Politiques et planification en conservation à Conservation de la nature Canada
En ce Jour de la Terre, il n’a jamais été aussi pressant de reconnaître l’importance des forêts pour la conservation ainsi que leurs bienfaits pour les collectivités et notre santé. Elles jouent en effet de nombreux rôles essentiels pour la nature et la population : elles abritent des centaines d’espèces, filtrent l’air et l’eau et sont des lieux privilégiés où créer des liens, se divertir et trouver la tranquillité. Elles régulent également la température et les phénomènes météorologiques, tout en retirant du dioxyde de carbone de l’atmosphère.
Toutefois, de nombreuses pressions, notamment les tempêtes violentes et les feux de forêt, les espèces envahissantes et la destruction des habitats, menacent ces écosystèmes, les bienfaits qu’ils procurent et les liens qu’ils permettent. Quand nos forêts sont en péril, la qualité de l’air que nous respirons et de l’eau que nous buvons l’est aussi. Des centres urbains les plus animés aux villes rurales les plus éloignées, le bien-être de l’ensemble de la population canadienne est en jeu.

Paruline à ailes dorées (Photo de Christian Artuso)
Les forêts du Canada comptent pour près d’un dixième du total mondial. Nous sommes en effet l’un des pays les plus boisés au monde, devant les États-Unis et tout juste derrière la Russie et le Brésil. On trouve chez nous des habitats forestiers intacts et connectés, ainsi que d’importantes réserves de carbone terrestre. Avec ses quelque 140 espèces d’arbres indigènes, notre pays a un rôle unique à jouer et se doit de protéger ces écosystèmes.
Parmi les 426 espèces d’oiseaux qui se reproduisent au Canada, environ un tiers dépend des forêts pour survivre. Chaque année, les forêts du Nord canadien sont l’habitat de nidification d’une multitude d’oiseaux migrateurs qui vont par la suite passer l’hiver aux États-Unis, en Amérique centrale et encore plus au sud. On estime en effet que chaque automne, ils sont de 3 à 5 millions, des minuscules parulines aux grands cygnes, à quitter la forêt boréale canadienne pour migrer vers le sud.

Forêt de Darkwoods, C.-B. (Photo de Bruce Kirkby)
La valeur économique de nos forêts est tout aussi vitale que leur importance écologique. Selon l’Association des produits forestiers du Canada, plus de 200 000 Canadiennes et Canadiens subviennent directement à leurs besoins grâce à la foresterie, à l’agriculture durable et à l’écotourisme, ce qui représente un chiffre d’affaires annuel impressionnant de 87 milliards $.
Depuis 1962, Conservation de la nature Canada (CNC) défend ardemment la cause de la conservation des forêts et a contribué à la protection de plus de 1,6 million d’hectares de ces écosystèmes, ce qui représente plus de deux fois la superficie de l’Île-du-Prince-Édouard. En collaborant avec des propriétaires fonciers, des entreprises, des gouvernements et des nations autochtones, nous contribuons à la conservation de ces habitats qui sont d’une grande importance pour la nature et qui fournissent des bienfaits sur les plans économique, communautaire et de la santé.
Au nombre des lieux exceptionnels que nous avons pu protéger, on compte le plus vaste projet de conservation de terres privées de l’histoire du Canada. Situées près de Hearst, en Ontario, les Terres boréales, d’une superficie de 145 000 hectares, font deux fois la taille de la ville de Toronto. On y trouve des ours noirs, des orignaux, des loups et des lynx du Canada, de même que des oiseaux rares, comme la paruline du Canada, l’hirondelle rustique et le moucherolle à côtés olive. Ce territoire compte plus de 1 300 kilomètres de rivières et de cours d’eau, de vastes tourbières qui stockent du carbone et des étendues apparemment infinies de forêt intérieure. Les Terres boréales stockent à elles seules plus de 192 millions de tonnes d’équivalent de CO2, ce qui correspond aux émissions moyennes à vie de 3 millions de voitures. Cette réussite a été rendue possible grâce à la générosité d’un grand nombre de donatrices et donateurs.
Un autre remarquable exemple de partenariat est celui du projet de crédits de carbone forestier mené à l’aire de conservation Darkwoods de CNC à West Kootenay, en Colombie-Britannique. Ce site de 63 000 hectares de vallées, de montagnes et de lacs isolés constitue un habitat vital pour 39 espèces en péril, y compris le grizzly, le carcajou et l’omble à tête plate. Avec ses 17 bassins versants et plus de 120 lacs, Darkwoods alimente en eau les collectivités environnantes. De plus, ses forêts purifient l’air, stockent du carbone et atténuent en partie les pressions croissantes exercées par les changements climatiques. Par ce projet, CNC permet aux parties intéressées de réduire leur empreinte carbone en faisant l’achat de crédits carbone certifiés à l’échelle internationale.

Réserve naturelle Clyde River, N.-É. (Photo Mike Dembeck)
Dans l’ouest de la Nouvelle-Écosse, CNC a récemment créé la réserve naturelle Clyde River, près de Shelburne. Près de 82 % de sa superficie est couverte de forêt Wabanaki (acadienne), peuplée notamment d’érables rouges, d’épinettes noires, de pins blancs, de sapins baumiers, de pruches et de chênes rouges. Cette forêt mixte constitue un habitat de reproduction idéal pour divers oiseaux inscrits sur la liste de la Loi sur les espèces en péril du Canada, tels que la paruline du Canada, l’engoulevent d’Amérique et le moucherolle à côtés olive. Les autres espèces présentes sur le territoire incluent l’ours, le castor, le renard et le cerf de Virginie. L’emblème floral de la Nouvelle-Écosse, la fleur de mai (aussi appelée épigée rampante), est aussi présent dans la forêt, de même que plusieurs espèces de lichens rares.
CNC examine de nouvelles occasions prometteuses! En se fixant l’objectif ambitieux de conserver un million d’hectares supplémentaires de nature d’ici 2030, CNC prend les devants pour préserver notre patrimoine naturel. Notre travail ne consiste pas seulement à prendre soin du territoire, mais aussi à veiller à ce que les collectivités continuent à prospérer en harmonie avec la nature.
Pour ce faire, nous encourageons le secteur privé, les fondations et les particuliers à se joindre à nous pour investir dans le travail de conservation et de restauration des forêts. CNC a fait ses preuves quand vient le temps de rallier à sa cause des propriétaires fonciers, des particuliers et des collectivités. L’air pur, l’eau potable, des aliments sains, nos emplois et notre bien-être général dépendent de la nature et des forêts.
Le message est clair : protéger les forêts du Canada, c’est faire de même pour nous. Si nous voulons assurer la résilience de la nature, notre prospérité économique et notre santé, nous devons faire notre part. En tant que Canadiennes et Canadiens, nous avons à la fois le devoir et le privilège de contribuer à la protection des forêts. Unissons-nous et relevons ce défi avec conviction et diligence. Les forêts sont plus que la toile de fond de nos vies; elles sont l’essence même de notre avenir.